LES BALANCELLES

A plusiers reprises nous avions demandé que les personnes qui pouvaient nous parler des "balancelles" à Bougie nous contactent. La dernière fois c'était dans le numéro de 2013.
Un Bougiote nous a contacté un bon moment plus tard. Hélas, nous avons égaré ses coordonnées et malgré une demande dans notre "avis de recherche", cette personne ne s'est plus jamais manifestée...
Beaucoup d'entre nous se souviennent de ces petits bateaux, en bois pour la pluspart, qui se déplacaient à la voile et qui furent ensuite équipés de moteur. Ils effectuaient des transports côtiers de toutes sortes, et surtout à une époque, de poteries en provenance de Tunisie (voir carte postale).
Nous avons resorti de nos archives un texte de souvenirs de Marcel Castell*, daté de 2013 et qui répondait aussi à notre annonce, texte que nous avions mis de côté à l'époque car nous le trouvions pas assez fourni.
Nous le ressortons à présent en espérant qu'il réactivera les mémoires de certains.

Voici ce que nous disait Marcel,

« Un petit récit personnel au sujet de ces navires.
De 1942 à 1946, il m’a été donné de travailler dans une Agence Maritime et de côtoyer le travail de ces petits caboteurs côtiers. Du 11 Novembre 1942 à 1945, les forces alliées avaient interdit la navigation des balancelles, pour cause de guerre. Au paravent, ces bateaux étaient utilisés pour le transport de sable depuis les plages de la côte ouest (Oued Dass ou Boulimat, par exemple), sur le port de Bougie. Ce sable de grosse granulométrie n’étant pas encore fabriqué par les carrières de Sidi-Yahia, alors que l’on en trouvait sur ces plages, sable très recherché pour le bâtiment, pour les crépis extérieurs. La balancelle s’approchait de la plage, et quelques ouvriers, avec de gros couffins en alpha, remplis de cet agrégat, grimpaient à bord, sur un simple madrier et le versaient dans la cale. La balancelle revenait au port et de la même façon, le sable était déchargé à quai. Je plaignais ces dockers pour ce dur et pénible travail. La guerre ralentit les rotations de cargos entre la France et l’Algérie. Un seul navire prenait le fret pour notre port et aussi pour Djidjelli, en évitant cette deuxième escale. A nous, compagnies de navigation, d’acheminer sur Djidjelli les marchandises destinées à ce port. Les balancelles nous ont rendu service. J’ai connu trois de ces navires dirigés par leurs patrons : Monsieur Cocurullo et Monsieur Buono. Egalement un Djidjelllien, Monsieur Celice, en possédait une (balancelle).
Une concurrence s’était engagée avec des transporteurs routiers. Ils possédaient à cette période, des camions fonctionnant au gazogène. Un avantage pour ces camions, ils pouvaient charger et décharger en dehors des ports et ne craignaient pas la mauvaise mer.

Vu la pénurie de carburant, je pense que la balancelle devait assurer ses déplacements de port en port à l’aide de leur moteur diesel, mais qu’après avoir franchi les passes ils naviguaient toutes voiles dehors ».

1956 - Balancelle s'apprétant à entrée dans le port de Bougie
(Photo transmise par Roland Pêtre)
Balancelles à quai à Bougie (19ème siècle)
19ème siècle - Balancelles à Alger 19ème siècle- Port de Bougie

NDLR - Nous complétons cet article après différentes recherches.

La balancelle : type de navire rencontré principalement en Méditerranée.
A l'origine, gréé en voile latine enverguée sur une longue antenne. Proche du type felouque. En italien : « bilancella ligure ».
Pouvait comporter un ou deux mâts.
Etait également utilisée pour la pêche, du moins en Italie.
(d'après Sergio Bellarda et Edoardo Guerrieri - Vele italiane della costa occidentale - dal Medioevo al Novecento).
Un certain nombre d’immigrés Italiens touchèrent les côtes de l’Afrique du Nord à l’aide de ces embarcations au 19ème siècle.
Ce nom viendrait du croisement du mot génois « bänsa » (balance) et du mot napolitain " palanza "ou « paranzella ».
En Espagne ce type d’embarcation existait aussi, nommé « Golondrina » (hirondelle).
Comme les Italiens, des immigrés Espagnols touchèrent eux aussi les côtes d’Afrique du Nord à bord de ces embarcations (témoignages recueillis sur Internet).

Vésuvius, catalan and paranzella
Peinture de Edward William Cooke (1811-1880) peintre anglais - paysages et marines

Balancelle espagnole 18 ou 19ème siècle
le pavillon est celui de la flotte marchande espagnole
de 1785-1927
* Marcel Castell est décédé le 01/10/2015. Il a produit plusieurs articles pour notre journal.C'est donc à titre posthume que nous publions celui-ci. Qu'il en soit remercié.
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